>>Jean-Jacques Rosat : Le dernier homme en Europe. Penser avec Orwell

Le dernier homme en Europe. Penser avec Orwell
Avec Jean-Jacques Rosat, maître de conférence et responsable du département Editions au Collège de France, directeur de la collection « Banc d’essais » (éd. Agone)

Espace Claude Lévi-Strauss, dimanche 14 février, 1630h-17h30

« LE DERNIER HOMME EN EUROPE ». PENSER AVEC ORWELL Expérience, littérature et réflexion politique

« Le dernier homme en Europe », tel devait être initialement le titre de 1984 – ce roman satirique qui raconte la destruction d’un homme et la possible disparition de l’humanisme dans un État européen contemporain. Essais, romans, reportages : toute l’œuvre d’Orwell est écrite contre cet avenir de cauchemar, face auquel la seule alternative est pour lui celle d’un socialisme radical, égalitaire et démocratique. Le lire aujourd’hui nous confronte à une série de questions.

1/- Que peut apporter à la réflexion politique un auteur qui, comme Orwell, évite délibérément toute théorie ? En quoi la théorisation en politique peut-elle être trompeuse ou dangereuse ? Quelle relation la pensée politique peut-elle avoir avec l’expérience vécue de chacun ? Renforcer la confiance de chacun dans sa propre expérience et son propre jugement est-il, comme le pense Orwell, un but politique d’une importance décisive pour un démocrate ? Et, si oui, par quels moyens peut-on y parvenir ?

2/ - En quoi la critique orwellienne du socialisme par en-haut, du socialisme des intellectuels –ceux qui veulent réformer la société au nom du peuple aussi bien que ceux qui veulent la diriger au travers d’une avant-garde – est-elle nécessaire ? Prôner un socialisme par en-bas - chez Orwell, un socialisme de l’« homme ordinaire » – ne risque-t-il pas de nourrir un anti-intellectualisme « populiste » ?

3/ - En quoi le sens du réel – le souci de la vérité, de l’objectivité, des faits, qui est une constante de la pensée d’Orwell – est-il indispensable à la démocratie ? La lecture d’Orwell nous conduit-elle à voir dans le post-modernisme (qui congédie les idées de vérité et d’objectivité) un adversaire de la démocratie et de tout projet émancipateur ?

4/ - Quel rôle la « décence ordinaire » (Orwell) peut-elle avoir en politique ? Est-ce une forme de sentimentalisme moralisateur ou un ressort fondamental de toute politique émancipatrice ?

5/ Quel a été l’apport original d’Orwell dans l’analyse et la critique du totalitarisme ? Faut-il considérer que la critique du totalitarisme aboutit toujours en fin de compte à la justification de l’ordre établi, ou bien faut-il comme Orwell la considérer comme une précondition de toute pensée qui veut être réellement libératrice ? Peut-on dire que la critique orwellienne du totalitarisme est une critique interne à la pensée politique de gauche ? Qu’a perdu cette dernière et que perd-elle encore aujourd’hui à ne pas intégrer une telle critique ?

6/ Orwell a été bien plus qu’un « auteur engagé » : il a voulu « faire de la littérature politique un art ». Une littérature politique peut-elle exister ? Peut-elle être autre chose que de la propagande ? Quelle relation la littérature peut-elle entretenir avec l’expérience politique (les expériences de domination et de liberté, celles d’exclusion et celles de solidarité, etc.) ? En quoi peut-elle utile voire indispensable à la compréhension de telles expériences, et à la réflexion sur elles ?



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