La (politique de) mixité sociale vient-elle renforcer les ghettos ?
Nous vivons une période de croissance des inégalités sociales : les écarts de revenus s’élargissent, les statistiques sont formelles là-dessus. Cette aggravation de l’écart entre riches et pauvres est rapidement associée à la montée des ségrégations sociales et spatiales : riches et pauvres vivraient dans des espaces distincts et se rencontreraient de moins en moins.
Devant ce scénario destructeur de la cohésion sociale, tout le monde invoque la mixité sociale comme la seule alternative à un inadmissible Apartheid. La cohabitation des riches et des pauvres, mais aussi des Français « de souche » et des étrangers devrait permettre de resserrer les liens sociaux qui se distendent. Mais, dans la pratique, ce principe est traduit de façon contradictoire :
dans les quartiers populaires du centre ville qui se « gentrifient » (à Paris, Belleville par exemple), il y a bien une certaine mixité « ethnique » qui permet de valoriser le cosmopolitisme et la tolérance, mais au détriment des plus pauvres qui sont évincés ;
dans les quartiers d’habitat social à la périphérie, la « rénovation urbaine » cherche à attirer les classes moyennes pour réaliser la mixité sociale, mais celles-ci traînent des pieds. Les logements des habitants les plus pauvres sont détruits mais, au lieu de les reloger en les dispersant, ils sont concentrés à nouveau, souvent à proximité ;
enfin, les « beaux quartiers » ne sont nullement concernés par la mixité sociale.
Ainsi, on détruit des « ghettos » pour réaliser une certaine mixité sociale entre classes moyennes et fractions supérieures des classes populaires, mais on reconstitue de nouveaux « ghettos » à proximité, où échouent les pauvres indésirables.
La revue Espaces et Sociétés vient de publier un numéro spécial sur la mixité sociale et elle organise cette table ronde pour confronter ses analyses avec celles de chercheurs et/ou de praticiens avec des points de vue différents.
Avec Stéphanie Vermeersch (Espace & Sociétés), Sylvie Tissot (GSPE-PRISME, Strasbourg), Bénédicte Madelin (Profession Banlieue, Saint-Denis) et Marie-Christine Jaillet (CIEU-LISST, Toulouse). Modérateurs : Maurice Blanc et Catherine Bidou (Espace & Société)
Salle Michel de Certeau, samedi 13 février, 17h-18h30